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Quatre filles et un garçon
18 octobre 2010

Lundi 18 octobre

10h45

– Ahhhhhhhhhhhhhh. Viens de recevoir un SMS. Beeeuuuurrrrkkkk. Natacha.

Oui. L’autre conne m’a envoyé un message. Pas des insultes. Non, plutôt un truc sympa. Elle espère que je vais bien (Ah, bon ?!). Me dit qu’elle va bien (m’en tamponne le coquillard). Mais surtout : elle me dit qu’elle prendrait bien un verre avec moi un soir après le boulot. Elle me demande aussi de ne pas en parler à Jules.

Ça risque pas, n’ai toujours pas de nouvelles.

11h03

– Suis toujours perplexe devant mon portable et l’étrange message de l’autre connasse. Ne sais pas quoi répondre.

11h15

– Pourrais la voir vite fait. Le temps de siroter un petit verre. Mouais.

11h23

– Pourrais aussi ne pas y aller. Ouaip. Mais va falloir que je la joue finaud. Trouver l’excuse...

11h25 – Téléphone.

-           Salut Max. C’est Natacha.

-           Ah. Euh.

-           Je t’appelle juste pour savoir si tu as reçu mon message.

-           Ah. Oui, justement…

-           Super. On peut se voir ce soir alors ?

-           Ah. Ben…

-           Á ce soir, alors. Je passe à ton boulot. Á

18 heures

.

Tutt.

Connasse.

M’a même pas laissé le temps d’en placer une.

Me suis fait piéger.

Vais pas en parler à Nathalie sinon je vais me prendre une méga engueulade.

***

Pas la peine d’insister sur le fait que fatalement, j’ai passé une journée de merde.

Hein, pas la peine ?!

***

18h10

– Par principe, je sors en retard - histoire de la faire poireauter un peu.

18h22

– Toujours pas là, l’autre pétasse.

18h28

– La voilà.

Du coup, c’est moi qui ai poireauté.

Je crois que ni elle ni moi n’a envie que ce petit verre dure toute la soirée. Du coup, sans même se concerter, on se dirige vers le bar le plus proche.

Assis face à face. Moi devant un coca. Elle avec un café.

Elle a eu le dessus pendant notre « conversation » téléphonique, faut que je marque des points maintenant. Je me lance.

-           Ça va ? je demande pas super à l’aise.

Elle arrête de touiller son café. Pose sa cuillère calmement. Et me fixe droit dans les yeux.

-           Tu penses bien que si j’ai voulu qu’on se voit, ça n’est pas pour qu’on parle de la pluie et du beau temps. Je sais très bien que tu t’en fous de comment je vais ; tout comme je me moque bien de savoir comment tu vas.

Au moins, ça a le mérite d’être clair. En revanche, suis pas certain d’avoir le dessus sur la conversation.

-           Ce qui m’intéresse, c’est Jules, elle me lance froidement.

-           Moi aussi, je réponds en tentant de reprendre du poil de la bête.

-           Parfait. C’est exactement là où je voulais en venir : qu’est-ce que tu lui veux ?

-           Par.. pard… pardon, je bégaye.

-           Qu’est-ce que tu lui veux ? Qu’est-ce que tu cherches ?

-           Mais rien. Je veux passer du bon temps. Et qu’il en passe aussi. Et si possible, ensemble. Voilà. C’est tout.

-           Ne joue pas à ce petit jeu avec moi. Je sais très bien ce qui t’intéresse.

Euh, moi, j’avoue que je suis un peu largué.

-           Tu en veux à son argent. Laisse-moi être claire. Les parasites dans ton genre, j’en ai vus défiler. Y’en à pas un qui a résisté. Avant que je t’écrabouille comme les autres. Oublie Jules. Lui saura très bien se passer de toi.

Même pas le temps d’ouvrir la bouche que Natacha se lève et me plante devant mon petit coca. N’a même pas bu son café mais m’a gentiment laissé la note. Berk. M’a coupé mon envie de coca. Pffff.

***

-           Vais me la faire l’autre tarée, me dit Nath, furieuse. Elle a un pet au casque ou quoi ? Qu’est-ce que c’est cette histoire d’argent ? hurle Nathalie dans le téléphone.

-           Ben, j’en sais rien, je dis.

-           Il est riche, Jules ?

-           Sais pas. C’est pas dans mes habitudes de demander un relevé de banque aux mecs avec qui je sors.

-           Moi non plus. Déjà que des fois, j’oublie de leur demander leur prénom, soupire Nathalie dans le combiné.

***

Marie regarde Paulo droit dans les yeux. Lucie aussi. Magali le fixe avec un air méchant. Nathalie ne le quitte pas du regard. Moi aussi, je le scrute.

Paulo, lui, a l’air très détendu malgré tous ces regards figés sur lui. Lucie se lance :

-           Il faut que tu bosses à l’école pour avoir des tas de diplômes.

-           Comme ça tu auras un chouette travail, ajoute Magali.

-           Tu pourras acheter une super belle voiture, je tente.

-           Et tu pourras te taper des tas de filles, conclue Nath’.

Marie fait des drôles de grimaces et lève les yeux au ciel.

-           Non, pas les filles, proteste-t-elle.

-           Pourquoi, demande Nathalie, il est gay Paulo ?

Marie s’insurge.

-           Ça va pas non, elle hurle avant de tourner la tête vers moi, très gênée. Enfin, ça ne me dérangerait pas. Là n’est pas la question. C’est juste que ça n’est pas le genre de sujet qu’on aborde avec un enfant de 7 ans.

-           Et pourquoi pas ? s’étonne Nathalie.

-           Pas comme ça en tout cas. On parle de boulot, de carrière, d’argent. Rencontrer une fille, ç’a à voir avec l’amour. Pas avec l’argent.

-           Mais ça aide sacrément, soupire Nath’. 

-           Ça dépend du genre de filles auxquelles tu penses ? demande Magali.

-           Reconnaissez que vous préférez vous taper des mecs à l’aise financièrement plutôt que des paumés sans une thune en poche. Sinon qui vous inviterait au restau ? Qui vous offrirait des fleurs ? Des bijoux ? Des voyages et tout le tralala ?

Silence.

-           Conclusion : si tu veux RENCONTRER une jolie fille, Nathalie jette un regard moqueur à Marie, il faut que tu bosses. Sans diplôme : pas de boulot ; sans boulot : pas d’argent ; sans argent : pas de voiture ; et donc : pas de fille. Compris ?

Paulo hoche de la tête et se lève.

-           Tu vas où ? demande Marie.

-           J’ai une interro de maths demain. Faut que j’ai une bonne note sinon Amélie n’ira pas avec moi à la boum de Michael samedi après-midi.

Nathalie opine.

-           Et toc ! lance-t-elle à Marie avant d’avaler une petite gorgée de vin. Je sais parler aux enfants, moi.

Humm. Je crois qu’elle se prend pour la nouvelle Dolto[1] !

***

Maintenant que l’avenir sentimental de Paulo est assuré, il est grand temps de s’occuper du mien et de raconter aux filles ma petite entrevue avec Natacha.

Les réactions ne se font pas attendre.

-           T’as qu’à la faire dézinguer par les hommes de main du mec de ta mère, propose Nathalie.

Bonne idée ! Suis sûr que si je claque des doigts, Lucio enverra l’autre conne faire un peu de plongée dans une baie sicilienne, les deux pieds scellés dans un bloc de béton.

Mauvaise idée.

N’aurais pas le plaisir de lui tordre le cou moi-même.

Ou alors, c’est moi qui coule le béton dans ses chaussures.

Excellente idée.

J’ai bien guetté la tête de Lucie pendant mon histoire. Ai à peine vu un sourcil bouger lorsque j’ai raconté que Natacha m’accusait d’en vouloir à la fortune de Jules.

-           Puisqu’on en parle, lance Nath’ à Lucie, il est pété de thunes ton cousin Jules ?

Peux toujours compter sur elle pour aborder les sujets délicats... sans aucune délicatesse.

-           Cousin par alliance, corrige Lucie.

-           C’est bon ; épargne-nous l’arbre généalogique de la famille, râle Nathalie. Il est blindé Jules ?

Lucie marmonne un truc, le nez dans son verre, en mâchouillant sa paille. N’ai rien compris. Nath’ hoche la tête, admirative.

-           Quand même ! elle soupire.

-           T’as compris quelque chose ? je lui demande.

-           Dès qu’il s’agit de pognon, tu pourrais parler en sumérien que je pigerais aussi vite.

-           Jules est le futur héritier de l’empire de son oncle qui a fait fortune en Afrique, confie Lucie. Dans des mines d’or et de pierres précieuses.

Résumons : ma mère se balade au bras d’un sicilien multimilliardaire et mon mec va hériter de mines d’or africaines.

Moi en revanche, j’arrive pas à finir le mois sans une lettre de ma banquière.

L’erreur. Le raté. Le looser. C’est qui, hein ? Je crois que c’est clair.

Quoique.

L’argent que j’ai sur mon compte bancaire le premier jour du mois – et qui s’en volatilise dès le lendemain –, je le gagne à la sueur de mon front. Pas en magouillant avec la mafia italienne ou en spoliant les populations africaines des richesses de leur sous-sol.

Je n’ai peut-être pas de fortune, mais j’ai une conscience. Na !

Cela dit, je ne vois pas en quoi tout ça concerne Natacha.

-           L’année dernière, Jules est tombé amoureux d’un garçon, raconte Lucie. Au bout de six mois, Natacha a découvert que le type en question avait dragué Jules sachant très bien ce que l’avenir lui réservait.

Mais moi, je m’en fiche des mines d’or et des cailloux qui brillent ; c’est jules que j’aime ; pas son héritage.

***

Incroyable ! Suis tombé in love[2] d’un gentil garçon tout simple et d’un coup de baguette magique, le voilà transformé en super riche héritier de la moitié des mines d’or d’Afrique. Peut-être qu’on devra quitter Paris pour aller gérer ses affaires sur place. Peut-être qu’on vivra dans une immense maison comme dans Autant en emporte le vent. Je nous vois déjà contempler les vastes étendues sauvages de la savane au soleil couchant. Avec, au loin, le rugissement d’un lion. Ma vie va devenir un super conte de fée.

***

Avant de me la jouer Out of Africa, va falloir que je me débarrasse de la méchante sorcière qui veut pourrir ma vie. Ai bien fait de ne pas boire mon coca tout à l’heure avec Natacha. Peut-être bien qu’elle l’avait empoisonné genre la pomme de Blanche Neige.

Avant de penser à trucider Natacha, vais d’abord tâcher de récupérer Jules.

***

Question : Et si cette conne avait déjà réussi son entreprise de sape de mon histoire d’amour et que Jules n’ai plus envie de me voir ?

Réponse : Hou la la. Comment je vais pas la louper celle-là.

***


[1] Françoise Dolto, pédopsychiatre.

[2] In Love : amoureux en anglais

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Commentaires
Quatre filles et un garçon
  • Chaque semaine, vous en saurez plus sur Max, Lucie, Marie, Magali et Nathalie. Vous allez les suivre dans une expérience incroyable, sur leurs lieux de travail, dans leur petit chez eux et... au fond de leur lit ! Bonne lecture à tous
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